Comme vous le savez si vous me lisez régulièrement, je vis en Suisse romande. Et même si je suis fortement biaisée en faveur de la littérature anglo-saxonne, j’essaie de suivre ce qui se passe au niveau littéraire dans mon petit coin de pays, parce que oui, il se passe des choses intéressantes!

J’ai donc décidé de vous présenter ici quelques recueils et romans suisses récents qui pourront vous donner un petit aperçu de ce qui se fait chez moi. Les voici dans l’ordre où je les ai lus!

Dernière rentrée, Tiffany Jaquet

Couverture de Dernière rentrée, par Tiffany JaquetUn après-midi de printemps, dans une classe difficile d’un établissement secondaire. Un coup de feu retentit. Qui a tiré? Pourquoi? La romancière répond à la question en déroulant le fil d’une année scolaire qui a vu arriver un nouvel enseignant bien décidé à dompter les jeunes rebelles avant de prendre sa retraite. Chaque chapitre, rédigé du point de vue du professeur Clottu ou de l’un des élèves, contribue peu à peu à assembler les pièces du puzzle…

Tiffany Jaquet, également enseignante, construit un roman choral subtil autour de personnages d’ados maltraités par la vie, qu’elle brosse avec beaucoup de sensibilité et réussit à rendre attachants en quelques pages. Elle parvient également à instaurer un suspense de plus en plus prenant avant la révélation finale. Bref, une lecture vivement conseillée en cette période de rentrée scolaire!

Plaisir de lire, 2018

La femme en rouge, Annik Mahaim

Couverture de La femme en rouge, par Annik MahaimDe nos jours, Nina, jeune femme aux convictions écologistes, entreprend des recherches sur la vie de sa grand-mère décédée. L’occasion de plonger dans l’Histoire en suivant le parcours d’Olga, peintre et militante communiste. Annik Mahaim dresse le portrait d’une femme déchirée: entre sa passion pour la peinture d’un côté, et son engagement dans un mouvement qui ne voit de l’art que son côté utilitaire de l’autre. Comment l’artiste peut-elle s’exprimer dans un parti qui ne saurait tolérer d’autres représentations que celles du quotidien des prolétaires ou des images de propagande? Et surtout, comment une femme passionnée et non-conformiste peut-elle s’épanouir dans un contexte où les convenances et les préjugés pèsent lourd sur les existences féminines?

Un très beau roman qui m’a vraiment séduite grâce à la force de la figure d’Olga et par une plume que je qualifierais de quasi-picturale tant elle est visuelle et fait appel à des images fortes.

Plaisir de lire, 2018

Nuit américaine, Pierre Lepori

Couverture de Nuit américaine, de Pierre LeporiCe court roman nous entraîne sur les traces d’Alexandre, animateur déchu d’une émission de radio nocturne. Un séjour à Montréal sera l’occasion de faire le point sur sa vie pour, peut-être, repartir sur de meilleures bases.

Pierre Lepori dresse un portrait touchant d’une ancienne star des ondes à la dérive, quinquagénaire esseulé et mal dans son corps en surpoids. Toutefois, ce qui m’a le plus émue, ce n’est pas tant l’histoire d’Alex que les tranches de vie insérées ici et là sous forme d’appels des auditeurs à son émission. Des voix solitaires, brisées parfois, à la recherche d’un peu de compagnie ou de réconfort. Un véritable concentré d’humanité que l’auteur livre avec sensibilité et bienveillance. En bonus, chacun de ces passages est accompagné d’une référence musicale, pour se plonger dans l’ambiance de l’émission.

De ce livre, j’ai aussi apprécié le style très fin et élégant, d’autant plus remarquable qu’il a été écrit en italien puis traduit par l’auteur lui-même.

Éditions d’en bas, 2018

L’âme déracinée, Manuela Ackermann-Repond

Couverture de L'âme déracinée, de Manuela Ackermann-RepondL’âme déracinée, c’est celle d’Angelo, jeune italien condamné à l’émigration en France dans les années 30. Adopté par une famille bourgeoise, puis aspiré par le cinéma et ses paillettes, Angelo n’oubliera pourtant jamais son enfance en Calabre et la petite soeur qu’il a laissée derrière lui. Sa vie sera désormais rythmée par cette question lancinante: de l’enfant pauvre, du jeune homme de bonne famille ou de la star des plateaux, qui est-il vraiment?

Comme dans son précédent roman La Capeline écarlate, Manuela Ackermann-Repond s’y entend à merveille pour faire revivre des époques désuètes: une campagne italienne idyllique, une France marquée par la guerre, l’âge d’or d’Hollywood forment la scène d’une quête identitaire touchante, même si je l’aurais préférée moins linéaire. L’incursion dans les coulisses du septième art est très réussie, parvenant à faire rêver sans cacher certains aspects plus sordides de la gloire. C’est sans doute la partie du livre que j’ai le plus appréciée.

Éditions Slatkine, 2019

L’Aigle de sang, Marc Voltenauer

Couverture de L'aigle de sang, de Marc VoltenauerChangement de décor pour l’inspecteur Andreas Auer: dans cette troisième enquête, le héros du Dragon du Muveran et de Qui a tué Heidi quitte Gryon pour Gotland, l’île suédoise dont il est originaire. J’ai bien aimé découvrir ce nouvel environnement ainsi qu’une intrigue basée sur les traditions nordiques, à travers un groupe qui réinstaure des rites païens pour le moins violents. On y apprend aussi à connaître un peu plus en profondeur l’inspecteur Auer qui va faire d’étonnantes découvertes sur son passé. Le déplacement amène finalement son lot de personnages inédits, membres de la police suédoise en tête, ce qui crée une nouvelle dynamique agréable.

J’ai par contre regretté la présence trop marquée de coïncidences et heureux hasards, ainsi que certains éléments de l’intrigue tournant autour de la famille d’Andreas qui n’apportaient pas grand-chose à l’histoire en cours – mais peut-être seront-ils exploités dans un prochain épisode…

Slatkine & Cie, 2019

Les choses à faire, Antoine Vuille

Couverture de Les choses à faire, d'Antonin VuilleQuatre nouvelles dans ce recueil, le premier d’un jeune auteur neuchâtelois. Cela paraît peu, et pourtant c’est idéal: elles sont ainsi assez longues et fouillées pour ne pas avoir ce léger parfum de superficialité que peuvent dégager des nouvelles trop courtes. Antonin Vuille dissèque l’intériorité de ses personnages d’un style aiguisé comme un bistouri, et tous sonnent parfaitement juste.

On se surprend ainsi à s’identifier aux protagonistes, à se reconnaître dans leurs angoisses et leurs ruminations, de l’adolescent mal à l’aise à une fête aux membres d’une famille incapables de communiquer en passant par l’étudiante qui perd son été en cherchant à le rentabiliser. Mention spéciale au jeune homme pris d’une frénésie de rangement qui cherche désespérément à équilibrer les rayonnages de sa bibliothèque tout en conservant une unité thématique par étage, problème épineux auquel chaque grand lecteur, moi la première, a dû se trouver confronté un jour.

Très bonne surprise donc que ce petit recueil qui se lit vite et facilement sans être futile pour autant.

L’Âge d’Homme, 2019

Avez-vous lu certains de ces livres? Est-ce qu’ils vous tentent?

Certains de ces livres m’ont été envoyés en service presse. Un grand merci aux Éditions d’en bas, aux Éditions Slatkine, à Slatkine & Cie, à Plaisir de Lire et à L’Âge d’homme pour ces lectures, ainsi qu’à Manuela Ackermann-Repond, Pierre Lepori, Marc Voltenauer et Antoine Vuille!

2 thoughts on “Mes dernières lectures suisses”

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