Table pour trois à New York est le premier roman d’Elie Bernheim. Le sujet: un jeune chef français, Gabriel, s’expatrie avec sa famille pour ouvrir un restaurant à Manhattan.
Une histoire contée à travers une narration éclatée qui alterne les points de vue de Gabriel lui-même, son épouse Norah, sa sous-cheffe Alicia, et son oncle Charles. Et entre eux, un angle mort… Tout est-il aussi rose qu’il le paraît dans la vie d’un Gabriel dont toutes les entreprises semblent couronnées de succès, qu’il s’agisse de son restaurant, de son mariage ou de sa famille?
Elie Bernheim réussit parfaitement à jeter son lecteur sur de fausses pistes, avant de bifurquer sur des chemins beaucoup moins conventionnels et plus intéressants que les premiers qu’il suggère. Le style est fluide et agréable sans faire dans le spectaculaire; l’auteur se fait visiblement plaisir en décrivant les plats succulents proposés dans le restaurant de Gabriel, et pourra mettre l’eau à la bouche des plus gourmands. J’émets plus de réserves concernant la forme choisie par l’auteur, que la quatrième de couverture présente comme celle d’un journal intime.
Cette annonce a généré chez moi des attentes qui n’ont pas été entièrement remplies. Au premier abord, effectivement, on est dans le journal intime, avec des en-têtes mentionnant les dates et des récits à la première personne. C’est en terme de contenu qu’un problème se pose. Dans un journal intime, on peut relater les activités de la journée, élaborer des réflexions, décrire ses états d’âme. Mais pourquoi irait-on raconter, hors de tout contexte, des événements qui se sont produits dix ans plutôt et que l’on connaît parfaitement depuis tout ce temps, comme lorsque Gabriel parle des débuts de la carrière de sa femme? On sent que par moments, la nécessité pour l’auteur de délivrer certaines informations se heurte au format choisi, avec pour résultat des passages qui sonnent désagréablement faux.
Ce choix narratif présente toutefois un avantage, et non des moindres: les chapitres très courts, qui tiennent parfois sur une page, imposent un rythme nerveux grâce auquel on se retrouve rapidement embarqué dans l’histoire. Les allers-retours entre les points de vue des différents personnages, dont certains sont temporellement plus avancés que d’autres, créent un suspense qui monte progressivement en puissance. Je me suis surprise, à partir d’un certain moment, à tourner les pages avec avidité. Une rapidité qui a aussi, bien sûr, ses inconvénients: malgré la narration à la première personne, on ne passe pas assez de temps avec les personnages et on n’apprend pas à les connaître suffisamment pour s’y attacher profondément.
En résumé, Table pour trois à New York est un roman surprenant et efficace malgré quelques maladresses. De quoi distraire et captiver des lecteurs avides de mystère et de détente!
Table pour trois à New York, Elie Bernheim. Editions Slatkine, 2020, 288 p.
A lire si: vous recherchez un roman qui se lit vite et facilement, avec des surprises et du suspense.
A fuir si: vous attachez beaucoup d’importance à un style sophistiqué ou à une analyse psychologique fouillée des personnages.
Un grand merci aux éditions Slatkine et à l’auteur pour l’envoi de ce roman en service presse!
Euh, j’aurais raconté des trucs passés dans un journal intime aussi… Parfois, on a besoin de s’épancher. Je comprends pas trop la critique du coup.
Sinon, j’ai honte de dire que je n’avais jamais entendu parler de ce livre…
Alors, c’est intéressant, parce que moi je me suis vraiment dit que ça ne me serait jamais venu à l’idée d’écrire ça dans mon journal intime. Dans le sens où c’est juste un résumé factuel de quelque chose que l’auteur du journal sait depuis dix ans, et qui ne le concerne pas personnellement en plus, sans que cela évoque une réflexion ou une émotion. Mais comme quoi, on peut avoir des approches très différentes et du coup, ma critique était peut-être injustifiée.
Et je ne vois pas en quoi ce serait une honte de ne pas en avoir entendu parler! Il vient de sortir et c’est une maison d’édition suisse dont je ne sais pas à quel point elle est présente en France:-)
Comme j’accorde une grande importance à la mise en place de l’ambiance et au côté profond des personnages, suis pas certaine que ça va me plaire. Par contre, le bouquin m’a permis de découvrir ton blog qui est très sympa ! 🙂
Ah oui, alors là ça serait peut-être un peu trop rapide pour toi, je pense… Mais merci de ton passage par ici, ça me fait plaisir que ce blog te plaise!